Schubertiade : L’état de grâce

La saison musicale de Paray le Monial a commencé avec un sublime concert de l’ensemble « Double Face » dirigé par Marie Garnier

En ce lieu d’exception qu’est la Villa Medicis de Paray-le-Monial, l’ensemble « Double Face » nous a offert un moment de grâce, mérité par le lieu et, naturellement par le public si particulier qui le fréquente. Patrice Boinet, maître d’œuvre, sait en tirer parti.

L’ensemble « Double Face », qui joue heureusement sur les mots, nous donne dans l’immédiat le sentiment d’une force heureuse, tant harmonieuse dans sa pratique instrumentale que vocale. Contrebasse viennoise qui n’avait pas encore besoin des hautes vagues du Romantisme naissant, restant donc dans son élégante assise, cornet à pistons avant que les pistons n’aillent aux guinguettes, donc suaves en chaque sinuosité ; un pianoforte qui ne peut envisager d’aller aux prouesses du romantisme et encore moins aux « autorités » du monde moderne mais qui garde l’acte de présence qui lui revient, merveilleusement coulé; une guitare, dite déjà « romantique », elle, mais à la mesure de son expression si particulière, et, enfin, une voix de mezzo soprano qui vient, comme en survol par son timbre d’exception au-dessus de ces prairies fertiles qui s’opposent au démonstratif. L’ensemble est une splendeur qui, au passage, nous fait découvrir un allemand fort loin des feux d’avant-scène schubertiens, mais qui rivalisent néanmoins avec la plus suave expressivité, Franz Lachner en témoigne par son étonnante présence, curieusement évincée par les habituels observateurs…

Que la Villa Médicis nous offre, de surcroît, quelques pâtisseries fines, en débord suave des émotions partagées, voilà qui nous ramène assurément à l’exactitude d’un bonheur…

Lucien Guérinel, compositeur